Le 4 juin 2017
Mon épopée, mon voyage, mon cauchemar, peu importe le nom, a débuté en 1999. Voici plus de 19 ans, j’ai été expédié dans le couloir de la mort du Texas pour un crime que je n’ai pas commis, et depuis lors, je me bats pour ma vie. Le moins que l’on puisse dire, c’est que ces 19 années n’ont pas été faciles. Plus souvent que je ne voudrais l’admettre, je n’ai pas été certain d’y arriver.
Mais chaque fois que je me suis trouvé à genoux, après avoir été assommé par un coup du sort dévastateur que la vie m’envoyait, ce qui m’a encore et toujours donné le courage de me relever, c’est l’amour et la compassion que mes amis me témoignaient. Je repense à l’été 1999, le premier ami dont j’ai fait la connaissance par correspondance était un jeune homme qui s’appelait Antoine. Il était étudiant en droit en Suisse et c’était un très bon ami. Il était avec moi au début de mon incarcération dans le couloir de la mort du Texas, et je suis resté en contact avec lui durant plusieurs années. Ensuite est arrivée Debbie, une charmante Anglaise. Elle a eu une influence tellement positive, elle m’a aidé à mûrir, à grandir et devenir quelqu’un de meilleur. Même si nous ne nous écrivons plus autant qu’au début, nous sommes toujours en contact et nous restons des amis très proches.
Je ne saurais compter tous les ami(e)s qui sont entré(e)s dans ma vie depuis lors. Quelques uns sont là pour une saison, peut-être deux, et d’autres sont des amis pour la vie, et ce sont eux que j’appelle les amis-pour-toujours. Chaque ami(e) qui entre dans ma vie joue un rôle essentiel et se trouve lié(e) à moi par la providence, c’est ce que je crois, pour une raison bien particulière. Peut-être que je ne suis pas au mieux de ma forme, et eux non plus, alors nous nous aidons mutuellement avec amour, compassion et soutien, ainsi, nous pouvons nous soigner les uns les autres. D’autres ont la possibilité de venir me rendre visite et d’apprendre à mieux me connaître en chair et en os ! C’est ce qu’il y a vraiment de mieux dans le couloir de la mort du Texas. Les parloirs sont la meilleure chose ici. Vient ensuite, juste après, le courrier/la correspondance. Chacun(e) tient une place dans ma vie et je sais que ce n’est ni une coïncidence ni un hasard.
Sans aucun doute, les meilleur(e)s ami(e)s que j’ai jamais eu(e)s dans ma vie, je les ai rencontré(e)s parce que je suis dans le couloir de la mort du Texas. Des ami(e)s dont l’amour et la compassion me laissent sans voix, et qui m’ont incité à devenir quelqu’un de meilleur, parce que ce sont des êtres merveilleux, et que je ne supporte pas l’idée de les décevoir. C’est incroyable de dire ça, j’ai tellement de chance d’avoir ces amis sincères à mes côtés, contre vents et marées.
19 ans, c’est long. Je repense au début que j’ai été envoyé ici. Je ne me permettais pas, alors, d’oser imaginer ce que ce serait que de quitter un jour cet endroit. J’avais eu des avocats franchement incompétents, et dès que je suis arrivé à Polunsky, on m’a flanqué deux autres avocats commis d’office, nommés par une juridiction de l’État du Texas, et ceux-là étaient pires encore ! C’étaient donc eux, les avocats censés m’aider à sortir de ce trou ? Avec des mecs comme ça pour me représenter, je n’avais pas besoin d’ennemis ! Donc, je ne songeais pas à la liberté, parce que je savais bien ce que cela voulait dire que d’avoir une assistance juridique inefficace pour mon appel auprès des tribunaux de l’État du Texas. Normalement, ça signifie qu’on est MORT ! À tel point que je me suis trouvé à six jours d’être exécuté ! Conséquence directe de l’incompétence de ces deux avocats que l’État du Texas m’avait attribués au départ. Mais je raconterai tout cela plus tard. Ce que je veux dire, c’est que je suis depuis longtemps engagé dans un combat pour ma vie, je tente de rester en vie puisque tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espoir !
Et chaque fois que je me suis trouvé abattu et meurtri, l’amour, la compassion et le soutien de mes amis ont été la source d’où j’ai tiré la force nécessaire pour me relever et continuer le combat. De cela, je leur suis éternellement reconnaissant.
En janvier 2017, j’ai rencontré une nouvelle amie. Dès la première lettre, j’ai su qu’elle était extraordinaire et que nous serions les meilleurs amis du monde, qu’elle m’aiderait et, surtout, que je serai moi aussi capable de l’aider. Appelons ça l’intuition, peu importe, je l’ai su, c’est tout ! Depuis le mois de janvier, j’ai appris à vraiment bien la connaître et elle m’étonne, tout simplement. Elle m’incite à devenir quelqu’un de meilleur. C’est ma prof ; à l’heure actuelle elle me parle de féminisme et je trouve ça super ! Elle m’apprend ce que sont les sites web, les hashtags et tout un tas de trucs super cool et j’aime ça ! Ce mois-ci, elle vient me voir au parloir ! J’en suis tout excité et j’attends ça avec impatience. Et nous avons même parlé de toutes les choses que nous aimerions faire ensemble quand je serai libre, ce qui est incroyable. Je suis si heureux que j’en ai des frissons parce que je SAIS que ça va arriver. Je sais aussi autre chose : mon amie Abby, rencontrée en janvier, est elle aussi une amie-pour-toujours et de savoir cela, je ressens une joie qu’on ne peut imaginer. Je suis un homme heureux d’avoir des ami(e)s comme ça et à chacun je veux dire merci d’être tel que vous êtes, de m’aimer et me laisser vous aimer.
Amour, Paix, Espoir et Liberté.
Charles Don FLORES.